Et si tout ne se finissait pas bien ? [Uriana]

On voyait que l’automne se rafraîchissait et que l’hiver n’allait pas tarder à faire son apparition. Le jardin de l’université devenait un peu plus désert chaque jour. Les étudiants ne mangeaient plus sur l’herbe mais à la cafétéria, ne lisaient plus à l’abri des arbres mais à la bibliothèque, personne ne jouait plus au foot ou au freesbee mais c’était plutôt des petits jeux autour d’une table au chaud. Mais certains résistaient jusqu’à ce que le froid soit bien trop rude pour oser mettre son nez dehors. Parmi les irréductibles, il y avait Erik. C’était un petit bonheur de s’asseoir sur le banc au bord d’un chemin assez calme, prendre un bouquin dans son sac noir et le lire sans que personne ne le dérange. Bon, vu le temps, c’était certain qu’il n’y avait pas de suicidaire qui viendrait lui demander un cours. En général, quand quelqu’un cherchait le jeune homme, les autres lui disaient « Erik ? Sur un beau dans le jardin ! » Et voila, on le trouvait sans problème. En cet après midi, il y avait un beau soleil sans nuage mais il faisait frais et quand le vent se levait, on en frissonnait car il était glacial. Alors pour se parer au froid, Erik avait mis une veste noire et un polo à col V blanc, assorti à son écharpe. Son petit jean lui allait à ravir et entre ses mains, un livre sur l’histoire de France. Il avait toujours trouvé que ce pays regorgeait d’une histoire riche, regorgeant de grands évènements, de guerres, trahisons, histoires de famille, c’était un peu les Feux de l’Amour qui durait depuis des siècles. Et voila qu’on empoisonne, qu’on trompe, que finalement un roi n’est pas friand mais demoiselles mais plutôt des jeunes hommes … A dire vrai, les histoires personnelles étaient beaucoup plus intéressantes mais en cours, on voit surtout les grandes guerres et les évènements politiques. C’est dommage car il n’y a pas que ça mais il fallait aller à l’essentiel. Heureusement que les livres existaient et que les bibliothèques aussi pour assouvir sa soif de connaissances. Au pire, il y avait les livres de chez lui ou Internet, mais rien ne valait de tourner les pages de papier même si les doigts rougissaient au fil des minutes à cause de la température assez fraîche.

J’aurais peut être du mettre des gants …

Oui parfois, il parlait à lui-même, tout bas et quand il n’y avait personne dans les environs. Il n’était pas fou non plus, juste un peu rêveur et tête en l’air quelques fois. Mais le plaisir de la lecture était au-delà de tout, cela lui évitait de trop penser à tout. Vous ne savez pas de quoi je parle ? Mais si, de son manque d’ambition quant à l’avenir que lui proposait son père, à la redoutable fatalité après ses études, à son futur mariage qui ne serait jamais annulé alors que lui, son cœur avait finalement choisi quelqu’un d’autre, à sa fiancé qu’il se devait d’aimer car le choix lui manquait … Finalement, la vie était bien plus compliqué que ses parents lui avait décrit et que les choix ne sont pas des plus faciles, forcément on fera du mal à quelqu’un ou alors à soi même. Pas vraiment gagnant quoiqu’il fasse … Alors pour éviter de trop s’égarer, ce qu’il a tendance à faire, il reposa ses yeux sur les lignes du livre pour lire la vie trépidante de Catherine de Médicis, la femme austère et pourtant si passionnante. Ca, au moins, le faisait penser à autre chose.

Sinon, il se connaissait, il allait se mettre sous un arbre et attendre que le temps passe. Ses derniers temps, un peu trop dans la lune. Mais même en cours, Erik décrochait quelques minutes et regardait dehors, la mer au loin, avait hâte de retrouver les rochers quand il emmènerait Max en balade. C’était son petit moment de liberté quotidien, cela faisait du bien et puis il n’avait pas à se tenir bien, à hocher de la tête, à faire le bon fiston ou le parfait fiancé qu’il n’était pas … Enfin, passons. Pas de blabla inutile, cela ne résoudrait rien. Alors replongé dans son livre, le jeune homme passait son temps entre ses deux cours. Et plus il est plongé, mieux c’est. C’est pour cela qu’il n’entendit pas les pas qui venaient jusqu’à lui. Pourtant, ces pas étaient si familiers qu’il aurait pu lever les yeux mais non, trop plongé dans sa lecture …

C’était décidé, Uriana se devait d’aller parler à Erik. Pourquoi continuerait-il de jouer à ce petit jeu malsain avec elle ? Depuis toujours, on lui avait répétait et répétait que c’était lui l’homme de sa vie et elle n’avait guère pris le temps de réfléchir à tout cela. Oui c’est vrai, pourquoi ne ferait-elle pas ce qu’on lui disait ? Erik était tout ce qu’une fille recherchait et en plus de ça, il était beau garçon. Elle avait donc foncé tête baissée dans cette relation qui aujourd’hui lui paraissait sans sens. Il fallait qu’elle se l’avoue, elle se prenait des claques en pleine tête à mesure que le temps s’écoulait. Mais hors de question pour elle de se faire ainsi humilier. Il fallait qu’elle reprenne le contrôle de la situation au lieu de ne jouer que le petit rôle, vous savez celui de la figurante qui n’avait pas d’autres choix que de laisser faire les choses. Uriana n’avait jamais été comme ça, et le fait qu’Erik en aime une autre l’avait réellement changé. Elle n’était plus la même, ne réagissait plus de la même manière, bref, elle ne se reconnaissait plus et ça aussi il en était hors de question.

C’est pourquoi elle choisit donc à ce jour de rendre une petite visite surprise à son ex-futur mari. Ah ah ah rien que de penser à ces quelques mots, et surtout d’associer ex à futur mari, cela lui donnait envie de rire intérieurement mais aussi de vomir. Sa vie avait toujours été digne d’un conte de fée et voilà qu’elle basculait soudainement du côté des contes sans grand intérêt que tout le monde évitait de lire, histoire de ne pas être ramener à la réalité, c’est-à-dire dans un monde où tout n’est pas si rose que dans les belles histoires. Uriana n’avait pas besoin de chercher Erik pendant des heures, elle savait pertinemment bien où elle pourrait le trouver, c’est-à-dire dans le jardin de l’université. Ils s’étaient d’ailleurs souvent retrouver ici lorsque tout allait encore si bien. Elle marcha pendant quelques minutes et c’est alors qu’elle le vit, un peu plus loin, assis sur un banc comme à son habitude, la tête plongée dans un livre. Cette vision la fit sourire. Elle s’approcha doucement de lui puis s’assit à ses côtés, sans trop rien dire.

Et pourtant, on ne pouvait pas dire que la jeune femme ne s’était pas préparée à cette discussion, au contraire, depuis le jour où elle avait deviné qu’il aimait une autre femme, elle s’était répétée des centaines et des centaines de fois cette scène mais rien n’a faire, rien ne se déroulait comme elle l’avait rêvé. Elle se frotta les mains entre elles, étant donné qu’il faisait assez froid, d’où le fait qu’ils devaient genre être les seuls dans le jardin. Elle essaya de ne pas croiser le regard du jeune homme qui avait relevé la tête en la voyant s’asseoir puis finit par parler, après quelques minutes de silence, et dans une atmosphère électrique, loin d’être celle qui devrait exister entre deux personnes qui s’aiment ou du moins s’aimaient…

Pourquoi ? … elle mit ses poches dans ses poches, comme si elle essayait de ralentir le moment venu puis continua en plongeant cette fois-ci son regard dans celui du jeune homme… Pourquoi hein, pourquoi Erik ? Qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça ? Combien de temps vas-tu continuer ce petit jeu ?

Vous l’avez compris, une tonne de questions trottait dans la tête de la jeune blondinette et elle espérait fort bien qu’Erik allait lui répondre, une bonne fois pour toutes…

Tu ne m'aimes plus c'est ça ?

C’était fou comme la lecture était un moyen de désintoxiquer l’esprit. C’était comme ses balades à la plage, c’était vital pour sa santé mentale tout en étant un moyen de distraction plaisant. Oui, il n’en fallait pas beaucoup pour qu’il s’amuse ou ait le sourire. Certains jeunes hommes de sa classe sociale préféraient les grosses voitures à changer tous les deux mois, les filles à gogo, les boîtes de nuits ou l’alcool à profusion. Non, ce n’était vraiment pas son style, lui avait toujours de ces types qui préfèrent les petites sorties au restaurant entre amis ou en couple, l’alcool avec modération et sa voiture tenait très bien la route depuis ces deux dernières années, son père lui en ayant offert pour ses 21 ans. Quant aux filles … Il n’en avait eu qu’une dans sa vie, jamais il n’avait été voir ailleurs. Disons que le Destin lui en a présenté une et qu’elle était exactement ce qu’il recherchait. Est-ce qu’embrasser, c’est tromper ? Pour certains oui, d’autres non. Erik faisait parti de la deuxième catégorie de personnes. Ca s’était arrêté comme ça, point. Bon les sentiments perduraient mais on ne contrôle jamais son cœur. Lui ne l’avait jamais fait seul à dire vrai. Uriana devait être la femme de sa vie et durant toute sa vie, elle l’a été sincèrement. C’était juste ces derniers temps, les choses avaient changé, d’autres paramètres, d’autres variables entraient en compte … L’horizon clair et limpide avait laissé place à un lourd brouillard. Et là, pas de famille pour te guider puisqu’ils sont tous persuadés que le chemin original est la meilleure solution puisque c’est eux qui l’ont choisi alors ils ne vont pas dire qu’ils se sont trompés. C’était mal connaître sinon la famille O’Connor.

Enfin, plongé dans sa lecture, Erik ne sut qu’il y avait quelqu’un proche de lui que lorsque la personne s’assit sur le même banc que lui. Enfin, le jeune homme leva la tête pour savoir qui osait le perturber durant sa lecture et qui osait affronter le froid pour venir lui parler. Vu le nombre de bancs libres dans ce jardin, il n’y avait pas d’autres possibilités que ce soit lui qu’on cherche. Et là, notre protagoniste que c’était Uriana, sa fiancée qui se trouvait là. Avec un sourire aux lèvres, il lui dit bonjour. Un long silence s’installa entre eux, lui ne savait pas trop quoi dire, il avait l’impression que quelque chose se tramait sans savoir quoi exactement et que si sa belle était venue jusqu’ici, ce n’était pas simplement une visite de courtoisie mais plus que ça. Pourquoi pensait il ça ? Allez savoir, un sixième sens peut être. Ou alors cette façon que la blonde avait de ne pas le regarder dans les yeux, comme s’il y avait quelque chose à cacher. Enfin, on dit que les yeux sont le miroir de l’âme et que l’on peut y lire ce qu’on veut en fixant quelqu’un. Lui attendait, son livre toujours ouvert à la même page mais le regard sur sa fiancée, attendant qu’elle brise cet insupportable silence. Ce qui se fit rapidement. Une question … Leurs regards qui se croisent et à présent plusieurs questions. Lui ne comprenait pas sur le coup et ses sourcils relevés montrait son incompréhension. A vrai dire, il n’avait pas du tout pensé qu’elle savait au sujet d’Arielle. Il n’en avait parlé à presque personne, évitait de trop la regarder quand ils se trouvaient dans le même coin et essayait de ne pas la croiser dans les couloirs de l’université. Mais peut être que c’était autre chose … Non, sur la question de l’amour, il n’y avait aucun doute sur le sujet. S’il ne l’aimait plus ? Bon, les sentiments ne disparaissaient pas du jour au lendemain, surtout quand une relation dure depuis autant de temps … Juste que, ça avait changé et que lui-même ne savait pas où il en était réellement. Une chose était sûre, il l’aimait toujours … C’était différent et il comptait bien le lui dire après avoir posé le livre à ses côtés, il était concentré maintenant sur la demoiselle.

C’est quoi ces questions ? Bien sûr que je t’aime toujours, je ne vois pas pourquoi tu dis ça …

Et si elle savait ? Oui, mais comment ? Si ce n’était pas à cause d’Arielle, ce n’était pas lui qui allait se trahir tout seul. Bon, si Uriana mettait tout sur la table, il n’allait pas nier, autant assumer ses responsabilités. Ce n’était pas un mauvais gars, juste un type qui avait la malchance de faire ses propres choix alors qu’il n’en avait pas l’habitude. Mais si sa fiancée voulait parler sérieusement, il n’allait pas se défiler alors s’approchant un petit peu, il posa sa main rougie par le froid et le vent sur le bras de la belle avant de reprendre.

Tu me trouves ailleurs en ce moment, c’est ça ? Si c’est ça, je sais, tout le monde me le dit ces derniers jours mais ce n’est pas à cause de toi, il ne faut pas t’en faire hein …

C’était sa faute à lui et à lui seul. Même s’il était avec Uriana depuis toutes ses années, il ne savait pas vraiment comment pensaient les filles. Son père lui disait d’être un homme mais de souvent prendre les torts pour lui, tout passait mieux. Conseil un peu vague mais si c’était fait avec sincérité, ça pouvait passer mieux. Qui a dit « pas sûr » ? C’est vrai que dans cette situation, ce n’était pas très bien parti …

Alors, ça y’est, l’heure qu’elle avait tant attendu et tant redoutée à la fois était enfin arrivée. Elle qui s’était tant répété cette scène, qui l’avait tant imaginé, n’arrivait même pas à ouvrir la bouche pour lui lancer en pleine tête tout ce qu’elle pensait vraiment, lui dire comment elle se sentait humiliée par tout cela, par toute cette histoire et blessée intérieurement. Rien n’a faire, aucun son ne sortait de sa bouche, rendant la situation plutôt pathétique. Et oui, Erik et elle étaient tous les deux assis côte à côte et aucun des deux ne semblait décidé à prendre la parole. Et dire qu’il y a encore pas longtemps, ils étaient si heureux ensemble. Bouh que le temps passait vite, mais surtout comment il changeait les choses. C’était dans des moments semblables qu’on se rendait plus ou moins compte que tout compte fait rien n’était jamais acquis dans la vie. Il suffit de voir comment les amis vont et viennent dans nos cœurs, comment tout peut basculer du jour au lendemain un couple, mais aussi en famille, et puis il suffisait aussi de voir que finalement la mort pouvait arriver soudainement sans qu’on l’ai vraiment vu venir et emporter un être qui nous était cher. Voilà vraiment à quoi se résumait une vie et rien que de penser à tout cela, Uriana affichait une mine de dégoût. Comment ne pas l’être de toute façon ? Elle qui avait toujours été plus ou moins gâtée, voilà que tout basculait. Elle perdait Erik au fur et à mesure que le temps filait sous ses yeux et elle savait pertinemment bien que sa famille allait en prendre un coup. Ses parents qui pensaient toujours avoir les bonnes idées en tête, le mariage de leur fille avec Erik en faisant partie. Uriana se demanda alors comment ils réagiraient en entendant la nouvelle, bien que son père était un minimum au courant mais bon, ne la prenant pas au sérieux, la jeune femme avait préféré évité de donner quelques autres détails pouvant le faire rentrer dans une colère monstre, parce que oui, pour lui, il verrait Uriana comme la fautive à tout ce bouleversement de situation, c’était genre obligé.

Bref, la jeune femme se décida enfin à tourner la tête vers son ex-futur mari après quelques minutes passées dans le silence, perdue dans ses pensées comme vous avez pu le voir juste au dessus. Elle finit par la suite à prendre la parole, voyant bien que de toute manière, Erik ne le ferait pas, sûrement attendait-il que ce soit elle qui parle, étant donné que c’était elle qui était venue lui rendre une petite visite surprise et non l’inverse. Mais malheureusement ce qu’elle lui lança à la figure n’était pas vraiment ce qu’elle avait en tête avant de le rejoindre mais qu’importe, maintenant que c’était fait, elle ne pouvait retourner en arrière. Elle aurait pu être satisfaite de sa répondre, il l’aimait toujours, c’était plutôt bon signe n’est-ce pas, mais au plus profond d’elle, elle ne l’était pas. Et surtout, elle ne savait pas si elle devait ou non le croire. Car bon, elle n’était pas si bête que ça, elle le savait très bien qu’il en aimait une autre et justement pour la jeune femme, on ne pouvait aimer qu’une seule personne en même temps. Pour elle, on ne pouvait donner son cœur qu’une seule fois et pour aimer une autre personne, il fallait attendre de le récupérer entièrement. C’était peut-être bête sa vision des choses, mais malheureusement, c’était bel et bien ce qu’elle pensait. Elle plongea son regard dans celui d’Erik et lui répondit :

Tu ne vois pas pourquoi ? Arrête s’il te plaît Erik, arrête tout ça, c’est fini tout ça tu comprends pas ?! Fini ok ? Et si je suis venue ici aujourd’hui c’est pour une seule et simple raison, et au plus profond de toi, je suis persuadée que tu sais très bien de quoi je parle…

Elle ne savait même plus comment elle l’avait su, il faut dire que d’un côté, c’était pas si compliqué que ça à l’apprendre, il était ailleurs, comme s’il l’évitait. Et malheureusement pour lui, Uriana avait un mode d’emploi des mecs dans sa tête. Ah ah ah. Non mais plus sérieusement, malgré le manque d’expérience total dans ce domaine, étant donné que depuis toute petite, on lui avait répété des centaines et des centaines de fois que c’était Erik qu’elle devait épouser et aimer, Uriana se doutait fort bien qu’il y avait une autre femme derrière tout ça. Elle fusilla donc du regard le jeune homme tout en lui répondant…

Il faut peut-être pas que j’en fasse, mais bizarrement, ce n’est pas le cas. Tu n’es plus le même, et je sais très bien que plus rien ne sera comme avant. Et tu le sais aussi très bien mais tu veux peut-être pas te l’avouer.

Elle reprit sa respiration, regarda au loin devant elle, comme si elle voulait oublier tout ce qui venait d’être dit mais surtout oublier comment sa vie avait changé en quelques temps… Elle se retourna vers le jeune homme puis continua…

Alors écoute moi bien Erik, tu vas me dire exactement ce qui se passe ok ? Je ne partirais pas d’ici tant que tu ne m’auras rien dit, même si je pense connaître le pourquoi de ton comportement…

Tous les deux, ils s’étaient disputés plusieurs fois. Normal, c’était dans tous les couples comme ça, pour des broutilles ou une mauvaise parole, aucun couple n’est à l’abri d’un clash et de quelques noms d’oiseaux jetés en l’air comme ça. Franchement, cela arrivait à tout le monde et puis il y avait des réconciliations, tout repart dans la bonne direction. Erik avait déjà entendu ses parents hurler, se faire la tête durant quelques jours et après avoir discuté, reformer le couple d’avant. Ce n’était qu’un exemple parmi d’autres n’est ce pas mais tout n’était pas irréparable et une bonne dispute remettait les choses à plat, de bonnes bases pour reprendre le chemin ensemble. Mais existe-t-il des moments où il y a des points de non retour ? On a tous peur d’être quitté ou de quitter quelqu’un, c’est une lourde décision qu’il faut prendre de son propre chef … Et franchement, Erik n’avait pas envie de quitter Uriana. Il ne savait pas quoi faire tout court. Si la jeune femme voulait des réponses, le jeune homme répondrait franchement. On dit que la sincérité faisait mal mais c’était toujours mieux que s’enfoncer dans un mensonge qu’on ne croyait pas vraiment soi même et que l’autre n’était pas dupe. Sa fiancée n’était pas stupide, elle en était même très loin. Puis vu ce que la jeune blonde disait, elle semblait savoir. Comment ? Ca c’était une autre question et secondaire puisque cela ne devait pas vraiment la réjouir que l’homme qu’elle doit épouser en aime une autre. Cela aurait été l’inverse, Uriana serait amoureuse d’un autre homme, Erik serait des plus peiné et aussi en colère, ce qui était normal. Il détestait mettre les gens tristes, surtout ceux qui lui étaient proches … Alors sa propre petite amie …

Il continuait de la regarder, pour une fois elle avait toute son attention. Pour une fois, il n’avait pas la tête ailleurs. Pour une fois, il affrontait la réalité. Erik restait pourtant silencieux, la laissant parler, la jeune femme semblait en avoir un petit peu sur le cœur. Depuis quand le savait elle pour être si remontée ? On aurait dit qu’elle avait cogité quelques temps avant de se décide à venir lui en parler enfin. Mieux vaut tard que jamais, dirons nous, n’est ce pas ? Personnellement, le jeune homme aurait préféré ne jamais avoir cette discussion, se prendre simplement la tête en solitaire et que personne ne sache ce qui chamboulait sa vie. C’était déjà assez compliqué de réfléchir seul mais alors si quelqu’un venait à s’en mêler, c’était fini ! Les autres influençaient, donnaient leur point de vue et donc ne faisait que grossir le brouillard qui entourait le jeune homme. Sa fiancée continuait de parler et elle avait tant raison : plus rien ne sera comme avant. Et si, il se l’avouait. Le jeune homme le savait au plus profond de lui … Mais comment en parler ? Poser des mots sur la situation était délicat.

Et maintenant des explications ! Hé bien, Erik n’aurait pas le choix, il va falloir mettre des mots sur ses sentiments, sur ses craintes et sur ses questions. Tout se passait dans sa tête, c’était plus simple. Personne ne savait, du moins il le croyait … Il ne l’avait pas quitté des yeux même s’il mourrait d’envie de les détourner, même de s’enfuir à toute vitesse. Mais non, il fallait assumer ? Hé bien, c’est ce qu’il faisait. Il ne contrôlait pas ses sentiments mais au moins pouvait il tenter de ne pas trop faire de conséquences douloureuses même si c’est déjà raté. Dans les yeux de sa blonde, il pouvait voir ce qu’elle ressentait. Hochant de la tête vaguement, sans que ça ait de sens, il se tut un instant. Le jeune homme regardait toujours sa belle mais avait l’air dans le vague quelques instants avant d’en parler daigner parler.

Ok, si tu veux savoir, je ne vais pas te mentir … C’est pas mon genre de toutes manières. Heu … Si j’ai la tête ailleurs ces derniers jours, c’est que je sais pas comment me sortir d’un pétrin où je me suis fourré.

Là seulement, il baissa les yeux. Pas facile à annoncer, Erik avait un cœur qui souffrait et en prononçant les mots qui sortit de sa bouche tandis qu’il leva les yeux pour la regarder.

Y a quelqu’un d’autre … Enfin non … Si mais c’est pas ce que tu crois ! J’ai jamais été voir ailleurs, il n’y a toujours eu que toi. Je me suis toujours dit que c’était avec toi que je serais, mais là, je ne suis plus sûr de rien du tout. Si je prends mes distances, c’est que je ne sais pas quoi faire … J’évite elle, toi, tout le monde … M’en veux pas.

Il se tut un instant.

Si, tu as le droit de m’en vouloir mais j’ai le droit de douter. J’ai connu que toi, mes parents ne me parlent que de toi, je n’ai jamais regardé une autre fille et le jour où je le fais hé bin …

Il tourna la tête, incapable de finir sa phrase. Hé bin quoi ? Il était tombé amoureux, c’est ça ? Ou alors c’était lui qui s’était monté la tête … Vous voyez à quel point lui-même était perdu ! Les pauvres, tous les deux, eux qui étaient si biens il y a quelques mois encore.

» #010 - Uriana Fraunhofer