#O3O - James Van Der Güntz

La vie sent le bonbon à la chlorophylle, un air de menthe fraîche en moins. Un bruissement de feuilles comme deux verres s'entrechoquant, le tintement du cristal absent. Des graviers roulant sous des centaines de pas lourds, un bruit sourd parvenant aux oreilles des marcheurs de l'après-midi. Des cris d'enfants jouant dans le bac à sable, se balançant de haut en bas rêvant de toucher le ciel. Des mères bien trop inquiètes, se rongeant les ongles devant les cabrioles de leurs progénitures. Des couples, main dans la main, se racontant leurs avenirs entourés de leurs futurs enfants. Des étudiants se taquinant, cigarettes au coin des lèvres, un sourire crispé et quelques boutades. Quelques airs de chanson oubliée, un fredonnement à peine perceptible, des doigts qui tapotent un vieux cuir, et un jeune homme le regard perdu dans un spectacle s'offrant à lui. Les après-midi sont des mines d'or, aux allures de zoo abandonné. Des herbes folles, des primates se courant après, des girafes cueillant quelques fruits persistants, des hippopotames se rafraîchissant au cœur d'une fontaine bétonnée ... J'ai vu des dauphins nager dans un ciel de coton, où des fleurs volaient caressant l'horizon. J'ai vu des arbres pousser remplaçant les gratte-ciels. J'ai vu au fond de l'eau une nuée d'hirondelles. Le parc accueillait des humains plongeant dans leurs petites vies parfaites, quelques jeunes gens faisant exception à la règle, des enfants innocents ne connaissant pas encore ce qui les attends. Les dix-heures trente ont retentit aux quatre coins de la ville, un son différent à chaque cloche d'église. Le soleil se cachait derrière des bouts de coton gris, privant les passants d'un peu de lumière et de joie de vivre. On avait l'impression de regarder un mauvais film, les nuages défilant à toute vitesse, le vent montant à toute allure. James cueilli au creux de sa main une brise fraîche. Alors une petite fille aussi belle que nature, me pris par la main et me dis suit cette aventure. Une sensation de pluie fine vint se frotter à sa peau hâlée, laissant une goutte suivre les courbes de ses doigts, de sa paume, de son poignet pour aller se nicher au creux de son tee-shirt abîmé par les lueurs du temps. Puis une seconde goutte vint se joindre à la première, caressant de près sa chair, suivit par quelques autres laissant place bientôt à une pluie torrentielle, privant James de la chaleur des rayons du soleil. Des enfants attrapés par la main à la volée, des gens qui courent s'abritant avec ce qu'ils trouveront sur leurs chemins. Le parc se vide, le bruit des clapotis des pas vinrent résonner aux oreilles de notre jeune homme. Des cris, des rires, des flaques d'eau et une pelouse détrempée. Elle m'emmena au loin avec une douceur sans fin. Et ses bouclettes dorées dégageaient ce parfum, qui depuis des années guidait ce chemin. Il s'arrêtait, accueillant chaque goutte de pluie sur sa langue, lui lacérant le visage sans fin. Des bras tendus, un corps immobile, une tête vers l'arrière, et des souvenirs qui ne cessent de revenir.

« Pour arriver enfin à ces rêves d'enfants, qui n'ont pas de limites comme on a maintenant ». Souviens-toi, souviens-toi, petit enfant hautain. Ta naissance, ton enfance, ou encore ton adolescence. Souviens-toi a quel point tu n'étais qu'un petit être insignifiant. Qui étais-tu d'ailleurs ? Un passé si vite oublié, un trait si vite tiré, une feuille si vite déchirée. Serais-tu un obscur personnage aux dents si pointues, au cœur si pur, aux envies si meurtrières ? D'où viens-tu, que fais-tu .. Ecoute moi jeune lecteur, écoute ce que je vais te conter. La vie peut paraître parfois si absurde, si belle mais aux lueurs si sombres. Imagine un peu, oui imagine. Une pluie torrentielle, un livre oublié sur une marche de pierre et quelques pages qui se tournent. Des centaines de rêves s'échappant à tout va, quelques personnages foulant le monde réel, des animaux se transformant en êtres humains, réels eux aussi. Regarde tout au fond de ce tableau, là sur ta gauche. Le vois-tu cet étrange personnage aux allures de loup choqué ? Oui cet homme d'une peau si chaude, si hâlée. De magnifiques grands yeux d'un noir profond, assortis à ses cheveux courts aux doux reflets d'argent. Une carrure si imposante, une taille élancée et fine, un regard qui t'en couperai le souffle d'un seul clignement de paupières. Certes, il ne ressemble en rien à un loup, ni à toutes autres créatures mais ton imagination est bien vaine. Remémore toi tes histoires d'enfance. Ces contes si connus que te racontait ta maman, sous un fin halo, une voix si douce. Tu avais la peur au ventre, tu ne voulais pas que le petit chaperon rouge se fasse manger. Tu t'en souviens ? Et que ferais-tu si tous les personnages deviennent réalité et qu'un jour tu tombes nez à nez avec le loup ? Raconte moi ton histoire à présent, raconte la moi je t'en prie.

Aurais-tu peur ? « Or, tout près de là, un loup affamé rôdait dans les bois ». Oh joli personnage, que tu as de grands yeux, un grand nez et de grandes dents ! Mais dit moi qui tu es, je ne sais rien de toi. Est-tu un personnage imaginé ? Quelqu'un qui n'existe pas ? Mais qui est-tu ? Je suis fière, arrogant, méchant de surcroît. Je ne supporte pas l'autre, je te regarde avec effroit, je suis le plus fort, le vainqueur, le meilleur. J'aime le combat, la compétition, je cherche à être le gagnant, celui que tu respecteras. Mais en réalité, je ne suis qu'un personnage insignifiant, ayant la peur du monde qui m'entoure. Je suis timide, apeuré, doux comme un agneau (quel ironie du sort pour un loup). Je ne supporte pas la pensée des autres, c'est mon antise, ma plus grande peur. Que pensent-ils de moi ? Je ne sais pas, et vivre dans la doute est une chose si .. horrible ?